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Télécharger le cours en pdf : 8_GE00201V_softpower
On n’est pas obligé de se massacrer les uns les autres ou de faire croire qu’on va se massacrer pour gagner en puissance, en aura, en poids international. La guerre et l’influence peuvent se faire « en douceur » via ce qu’on appelle le soft power, c’est ce qu’on va voir dans ce cours, comme toujours, en multipliant les exemples.
On commence tout de suite par une introduction en vidéo, que je vais vous demander d’analyser : La chronique Culture de la chaine africanews réalisée le 09 juillet 2018 Emission sur Youtube :
Emission intégrée dans le site web : https://theconversation.com/quelle-est-la-place-du-soft-power-francais-aujourdhui-173273
Vous venez de voir cette émission, répondez à ces questions :
Au-delà du pur « soft power » qu’on attribue en général uniquement aux influences culturelles, je vais m’attacher maintenant à vous montrer des facettes des courants d’influence géopolitique dans différents domaines, mais aussi comment les « dominations » de pays peuvent varier au cours du temps et pas seulement d’un point de vue militaire.. Comme toujours, je vais vous donner des pistes, à vous d’aller approfondir. Je vais passer en revue 5 exemples, 5 domaines, où se cache la puissance et la domination, et, quelque part, les enjeux géopolitiques :
- Les expositions universelles
- Le football
- Les Jeux Olympiques
- Le rayonnement Culturel
- Le poids de la science
- Et pour conclure, si on a un peu de temps : allons voir le lien très étroit qui unit aux USA cinéma et pouvoir politique
Commençons avec les expositions universelles dont théoriquement vous devez forcément en connaître deux : Paris 1889 restée célèbre pour… la construction de la Tour Eiffel, et Dubaï 2020 qui, du fait de la pandémie se déroule en ce moment même. Ces deux expositions sont révélatrices d’un monde qui change, d’enjeux internationaux qui se déplacent sur les territoires mondiaux, ici depuis l’apogée de l’empire colonial et du rayonnement français 100 ans après la révolution, jusqu’à un centre économique et financier , mais aussi une civilisation du bling bling recentrée sur les pays du Golfe. Mais voyons ça en détail…
Qui, quand et où ? La première exposition universelle a eu lieu en 1851 à Londres. En 1928 nait le Bureau International des Expositions qui va décider ce qui est vraiment une « exposition universelle ». Mais qu’est ce qu’une exposition universelle (ou internationale). Le BIE en donne une définition générale : manifestation qui a « un but principal d'enseignement pour le public, faisant l'inventaire des moyens dont dispose l'homme pour satisfaire les besoins d'une civilisation et faisant ressortir dans une ou plusieurs branches de l'activité humaine les progrès réalisés ou les perspectives d'avenir » On dénombre 37 expositions comme reconnues « universelles » et désormais, elles ont lieu environ tous les 5 ans et durent de 3 à 6 mois. Jouons : Essayez de relier les expositions et les lieux à des évènements marquants avant ou après !
Pourquoi faire une exposition universelle ? Pour le pays d’accueil c’est une occasion de montrer sa puissance scientifique, technique. C’est l’occasion aussi de « donner un coup de fouet » économique et urbain à une ville. Paris a changé de faciès avec les expos de 1889 et 1900. Ce n’est pas toujours le cas : l’expo universelle de Séville en 1992 est désormais un quartier abandonné à la périphérie de la ville ! C’est aussi l’occasion de s’insérer dans des rapports géopolitiques internationaux, de « prendre sa place dans la cour des grands » : Montréal, Dubaï, Milan… il est donc intéressant de noter que des pays comme la France où la Grande-Bretagne très présents au XIXe siècle ont laissé la place à des nouveaux venus, pays émergents du soft power, comme la Chine ou les pays du Golfe… C’est l’occasion de nouer des relations, y compris des relations entre entreprises.
Les prochaines expos de 2025 et 2030 ? Vers où se portent les regards ? Si l’exposition d’Osaka est officiellement reconnue pour 2025 (qui a déjà eu une expo en 1970) notamment après le retrait de Paris, 5 villes concourraient pour l’expo 2030, et c’est là que l’actualité internationale rejoint directement notre propos, là que hard power et soft power se rassemblent : est-il désormais envisageable que Moscou ou Odessa soient retenues par le BIE ? C’est fort peu probable. La guerre en Ukraine élimine d’office la capitale russe (qui pourtant commençait à revenir sur l’échiquier international, tout au moins en notorité) et que restera-t-il d’Odessa dans quelques jours ou quelques semaines ? Cela dit, on ne sait jamais… Riyad ? À peine 10 ans après Dubaï ? Busan en Corée du Sud alors que vient d’être élu un président d’extrême droite près à en découdre avec son voisin nord-coréen ? Nous voilà bien au cœur de stratégies internationales d’expansion de l’aura de certains pays en fonction de vrais évènements géopolitiques. Et une question simple aussi se pose : au moment où on parle de décroissance, de dangers de la surconsommation, du réchauffement climatique, est-il bien utile de faire ces grands messes internationales qui coûtent des milliards ??
Autre exemple, au poids énorme aujourd’hui tant économique que stratégique et social : le football D’où viennent les joueurs ? À qui appartiennent les clubs ? Qui organise les grands rassemblements ? À qui appartiennent les stades ? Finalement, qui gagne quoi au foot chez les grands clubs, pas en terme d’argent, mais bien de soft power ??
Lecture et analyse de texte : Allez sur le site de major-prépa et lisez le texte d’Astrid Plonquet paru le 23 août 2020. Répondez à la question : Quels sont les aspects géopolitiques du football ? https://major-prepa.com/geopolitique/le-football-terrain-geopolitique/
Ici encore, ne sommes-nous pas en pleine actualité dans ce cours de géopolitique : Pour ne pas « froisser » ses amis chinois et surtout pour ne pas risquer une exclusion prématurée de ses athlètes, le président Poutine a attendu la fin des Jeux Olympiques d’hiver de Pékin (mais pas des Jeux Paralympiques – ce qui est révélateur, une fois de plus, du mépris pour les handicapés !) pour déclencher son offensive contre l’Ukraine. Regardons donc d’un peu plus près le poids géopolitique des Jeux Olympiques…
Qui, quand, où ? Les premiers JO remonteraient à 776 av. J.C. en Grèce, rencontres festives et sportives, mais surtout religieuses organisées tous les 4 ans en l’honneur de Zeus. Les premiers JO dits « modernes » ont débuté en 1896, les JO d’hiver en 1924 (à Chamonix), les Jeux Paralympiques en 1960 (Rome)
Carte des Jeux Olympiques modernes (à partir de 1896) et d’été : À partir de cette carte citez les pays (et villes) ayant organisé les Jeux Olympiques. Que pouvez-vous en déduire ?
Les JO sont le reflet de l’actualité et de l’Histoire. En voici quelques exemples qui sont passés à la postérité : 1936 – JO de Berlin - Regardez et commentez cette vidéo : https://www.dailymotion.com/video/x7ql72l Où est le soft power ici ? Finalement, que va-t-il se passer ?
Les JO sont le reflet de l’actualité et de l’Histoire.
Les Jeux Olympiques sont vraiment le lieu où soft power et géopolitique s’expriment le plus.
L’une des armes les plus importante du soft power se fait par la diffusion de la culture : si l’on peut « imposer » à d’autres pays, d’autres nations, sa langue, son histoire, son éducation, sa religion, sa culture, alors il est beaucoup plus facile de dominer, surtout en faisant « oublier » les origines du dominé…
La colonisation par l’école. La création des grands empires coloniaux comme ceux des français ou des anglais s’est fait par le sang, mais aussi par la plume. Très longtemps, on a imposé aux peuples africains une scolarisation plus ou moins forcée où l’on enseignait les bases et préceptes du pays colonisateur. Apprendre à écrire c’est bien, apprendre à écrire le français, c’est déjà imposer une culture. Le plus flagrant a été pendant des siècles en Asie, en Afrique du nord ou en Afrique centrale, l’enseignement de l’Histoire de France. Oui, aux petits noirs d’Afrique Occidentale on enseignait que leurs ancêtres étaient les gaulois !!! Et ça continue : la politique chinoise au Tibet est exemplaire de cette colonisation par la Culture (d’abord dès 1951 avec l’invasion du Tibet, puis surtout depuis 1994) : interdiction du culte du Dalaï-Lama, suppression du tibétain à l’école, enseignants remplacés par des chinois… Et c’est la même chose chez les Ouïghours et désormais les Mongols… L’arme de l’enseignement est beaucoup plus forte qu’il n’y parait ! Que dire des écoles coraniques mises en place par Daesh…
Un soft power typique : les alliances françaises. Alliance française : organisation pour faire rayonner la langue et la culture française en dehors de la France. 832 alliances (en 2020) dans 131 pays. Elle date de 1883 et c’est désormais une fondation privée associée au Ministère des Affaires Étrangères. Souvent des initiatives locales (avec du droit local – attention ça n’est pas une ambassade !), avec des revenus autonomes. Permet d’apprendre le français, de diffuser localement la culture, spectacles, de prendre des contacts pour faire des études en France, de lire des livres en français… Possible personnels français détachés dans les AF… Le français est la cinquième langue la plus parlée dans le monde (1 mandarin – 2 anglais – 3 espagnol – 4 arabe). Langue officielle de 32 pays, 300 millions de francophones. D’autres pays ont des équivalents : le British Council , le Goethe Institut; l’Institut Cerventes… mais le système des alliances françaises est de loin le plus développé et implanté dans le monde.
Dernier point sur le soft power que je voudrais aborder : le poids de la science. La covid était en provenance de Chine, la planète entière a été (et est encore) touchée, et pourtant nous ne sommes pas vaccinés avec les mêmes vaccins. Russes, américains, européens, chinois, si l’OMS a autorisé 9 vaccins à ce jour, nous n’avons pas le choix. C’est typiquement un soft power qui impose un point de vue économique, épidémiologique, stratégique et politique à certains pays, voir continents en fonction d’accords, de filiation, d’échanges, de comportement géopolitiques ! Voyons l’exemple des universités…
La bataille des universités. Aujourd’hui, il existe une référence mondiale pour connaitre le classement des universités : le classement de Shanghai. Eh oui, c’est bien la Chine qui désormais établit le classement des universités !!!! Ce classement vise à montrer les 1000 universités les plus dynamiques dans le monde selon 6 critères :
Bien évidemment toutes les premières places sont prises par les universités américaines. Il n’y a que 4 français dans le top 100 et l’UT2J est non classée… À partir de ces chiffres, quelles remarques et critiques pouvez-vous émettre ?
Analysez également cette émission du dessous des cartes sur la guerre des universités :
Allez, pour conclure, mais nous aurions pu multiplier les exemples à l’infini, retour sur un thème abordé en introduction de ce cours : les liens entre cinéma et pouvoir, en particulier aux États-Unis. Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, les USA apportent leur aide économique à l’Europe et, en « échange », inondent l’Europe de leur modèle, notamment du cinéma hollywoodien. Aujourd’hui c’est 70% du box-office mondial, 80 à 95% en Europe. Tous les « messages » que veux faire passer l’Amérique transitent à travers leurs films. Mieux, régulièrement, le gouvernement américain et l’armée américaine participent financièrement, techniquement et surtout « politiquement » à la création de films, en particulier depuis le 11 septembre 2001.
Voir l’article de Télérama : https://www.telerama.fr/cinema/hollywood-au-garde-a-vous,72074.php
Voir aussi cette étrange « porosité » absolument impossible chez nous : des acteurs devenus hommes politiques de premier plan : Arnold SCHWARZENEGGER, très connu comme acteur, mais vous ne savez peut-être pas qu’il a été gouverneur de Californie de 2003 à 2011, presque un job de président ; Ronald REAGAN lui, piètre acteur de petit films dans les années 1940 s’est retrouvé président des USA de 1981 à 1989.
Vous avez vu qui est le nouveau héros des studios Marvel en 2021 ? Ce n’est plus le Captain America, héros de la Seconde Guerre Mondiale, ce n’est plus Iron Man, ingénieur milliardaire des années 2000, non , c’est Shang-Chi, créé en 1973 mais sorti l’année dernière sur tous les écrans du monde. Shang-Chi est chinois ! Et le Captain America 4 qui sort en 2025 est joué par Anthony Mackie, un acteur de couleur ! L'héroïsme américian représenté par un noir... mais c'est du cinéma...
Désormais, quand vous regarderez un film, une épreuve sportive, une nouvelle qui, apparemment n’a rien à voir avec la géopolitique et la stratégie internationale, demandez-vous si le soft power n’est pas en action…