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...Chez Francky

201-9

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 Télécharger le cours en PDF : 9_GE00201V_oublis

Ce ne sont pas les guerres qui manquent, mais à l’heure de la pandémie de covid et de quelques guerres « stars » des journalistes, voici quelques conflits dont on ne parle pas ou plus, et pourtant, chaque jour tuent !

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Mais d’abord, c’est quoi la guerre ? La guerre se définit comme un état de conflit armé entre plusieurs groupes politiques constitués, comme des États. Des querelles de voisinages ne sont pas des guerres, des heurts, même armés entre des manifestants et des forces de l’ordre d’un même Etat ne sont pas des guerres. La guerre obéit à des règles, des lois, des déclarations, des structures, des limites théoriquement à ne pas dépasser. En ce moment, Poutine est désormais accusé par la communauté internationale de « crimes de guerre ». Si la guerre se développe au sein d’un même État, on parle de guerre civile, guerre ethnique, guerre de sécession. Mais il faut un conflit « des deux côtés » pour parler de guerre. Massacrer une population non armée n’est pas une guerre, mais une épuration ou un génocide. Si les groupes de chasseurs-cueilleurs se tapaient dessus allègrement pour sauvegarder de la nourriture ou des territoires, on est à peu près sûr désormais que l’origine de la guerre remonte à l’apparition de l’agriculture et à la sédentarisation, soit il y a plus de 8 000 ans ! Des squelettes de ce qui semble être des soldats, ont été retrouvés au Kenya avec des traces de flèches et de lances qui dataient de 10 000 ans. Les guerres reconnues par la littérature ont eu lieu dès 4000 ans avant J.C. entre des cités en Irak. Enfin, le conflit qui a fait le plus grand nombre de morts est la Deuxième Guerre Mondiale : 60 à 70 millions de morts.

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Le poids des mots : Allez sur le site du journal 20minutes : https://www.20minutes.fr/monde/3241519-20220224-guerre-ukraine-pourquoi-vladimir-poutine-abstenu-faire-vraie-declaration-guerre

Lisez et analysez ce texte de Xavier Regnier (du 24 février 2022 – sachant que Poutine a envahi l’Ukraine à partir du 8 mars)  et répondez à cette question : Pourquoi Poutine n’a-t-il pas utilisé le mot « guerre » ?

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Et ça continue encore et encore ! Voici la triste carte des guerres actuelles (en 2020) dans le monde.  Si la grande majorité de l’Afrique à elle seule subit encore et toujours la plupart des conflits importants, on voit apparaitre des guerres presque insoupçonnées. Bien plus de 1 000 morts par an dans la guerre au Mexique, aux Philippines, au Nigéria, au Mozambique…

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Typologie. Dans le détail, voici les différents types de conflits : de mouvements indépendantistes peu violents mais réprimés durement comme en Birmanie par exemple, aux véritables conflits internationaux engageant plusieurs États comme en Irak. En tout, on compte plus d’une cinquantaine de conflits dont certains ne comptent, officiellement, aucun mort comme au Sahara Occidental mais dont d’autres comme en Somalie ou en Syrie dépassent le chiffre effrayant de plus de 500 000 morts. Les guerres sont-elles « oubliées » parce qu’elles ne font pas assez de morts ? Existe-t-il un « seuil de morts » pour que les journalistes s’y intéressent ? Possible. Nous y reviendrons en conclusion…

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Et ça s’éternise ! Il y a les guerres dont on parle pas, peut-être parce qu’on en a trop parlé depuis qu’elles ont démarré. Les conflits actuels, pour certains, ne datent pas d’hier !!! La guerre séparatiste kurde en Iran date de… 1946 (plus de 35 000 morts). En Birmanie (Myanmar), le conflit toujours en cours entre les différentes juntes militaires et les groupuscules séparatistes ou communistes date de l’indépendance du pays en 1948 et a fait au moins 200 000 morts ! La fin de la Deuxième Guerre Mondiale et la décolonisation ont déclenché de nouvelles guerres qui perdurent encore aujourd’hui, 70 ans après !

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Voici les exemples que j’ai choisis de vous détailler un peu, vous en avez, j’espère, forcément entendu parler, même si on n’en parle plus…Le Mexique, le Burundi, le Mozambique, la Nouvelle-Guinée et le Tigré. Mais j’aurais pu multiplier tant de sinistres exemples…

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On en entend que rarement parler, souvent mise en scène dans les films américains, la guerre de la drogue au Mexique sévit depuis au moins 2006.

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La guerre des cartels. À partir des années 1920, les USA interdisent l’usage de l’opium et de la cocaïne sur leur territoire et le Mexique en interdit la culture, ainsi que de la marijuana. Le pays était gros producteur notamment dans les régions nord du pays. Avec la Deuxième Guerre Mondiale le trafic clandestin va commencer à se développer et la demande aux USA va exploser dans les années 1970, la fameuse génération hippie. Les narcotrafiquants mexicains vont alors s’organiser en véritables petites armées, familiales ou régionales pour organiser le business.

Les USA vont régulièrement tenter d’enrayer le trafic et la production en allant détruire les plantations mexicaines, mais la culture s’est déplacée vers l’Amérique Centrale et la Colombie qui devient la plaque tournante mondiale de la production de cocaïne. Les trafiquants mexicains se réorganisent en conditionnement et transport, mais les milliards de bénéfices dégagés leur permettent de se renforcer et d’investir des fortunes en groupes armés. On est vraiment ici au coeur d’une des bases de la géopolitique : les conflits de territoires ou un pays est partagé en sous-territoires gérés par une dizaine de groupes, de cartels qui recompose la structure géographique du pays. À partir de 2004, c’est le gouvernement mexicain qui engage les militaires dans ce qui va devenir une véritable guerre interne au Mexique : conflits entre cartels, conflits avec les populations locales, conflits avec les troupes militaires. Depuis 2006, on estime qu’il y a eu plus de 375 000 morts dans ce conflit qui dure toujours.

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Un beau sujet de film, un fléau pour le Mexique ! Les États-Unis raffolent de films, en général très violents, parfois carrément débiles, qui parlent de la lutte contre les cartels de drogue mexicains. Les mexicains sont représentés comme des assassins sanguinaires ou des lâches aux yeux des américains, alors qu’une très grande majorité du peuple mexicain souffre de ce conflit qui fait plus de 10 000 morts par an. Désormais, le trafic de drogues se double du trafic humain avec la très forte demande de migration clandestine vers les États-Unis depuis toute l’Amérique Centrale. Il se pourrait d’ailleurs que dans les années à venir le trafic de migrants rapportent plus que le trafic de drogue, qui, dans le monde, rapporterait 400 milliards de dollars par an.

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La guerre mondiale de la drogue. Si on élargit ce problème de la guerre des cartels mexicains à l’ensemble de la planète, on voit apparaitre un vaste réseau mondial de production et de trafic avec principalement 3 zones de productions : le nord de l’Amérique Latine (Colombie, Pérou, Bolivie), Asie Centrale (Pakistan, Afghanistan) et Asie du Sud-Est (Thaïlande, Laos, Birmanie, ce qu’on appelle le Triangle d’Or). Parallèlement 4 zones de demande : États-Unis, Canada ; Europe ; Australie et de plus en plus, la Chine. Tant que cette demande sera forte, et elle l’est de plus en plus, les productions suivront et de fait, les systèmes économiques illégaux. C’est un combat sans fin, de l’échelle du quartier (il n’y a qu’à voir les informations récentes sur les luttes de pouvoir entre trafiquants à Paris ou Marseille) à l’échelle planétaire ! Et, avez-vous remarqué que les gros pays producteurs étaient aussi des pays ou des conflits armés se jouaient régulièrement ???

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Deuxième exemple de conflit armé en train de se redévelopper en cette année 2022 : la guerre du Tigré, cette région, au nord de l’Ethiopie qui jouxte la frontière avec l’Erythrée et le Soudan.

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Analyse de la vidéo de la leçon de Géopolitique du Dessous des cartes (01 décembre 2021) :https://www.youtube.com/watch?v=yEe5zxz1sBg. Comment le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, réformateur et prix Nobel de la paix est-il devenu un chef de guerre ?

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Analyse de la vidéo, interview de Noé Hochet-Bodin, journaliste, correspondant de RFI en Éthiopie.

•De quoi parle-t-on ?
•Qui est Abiy Ahmed ?
•Pourquoi a-t-il signé des accords de paix avec l’Érythrée ?
•Quels sont les pays impliqués ?
•Pourquoi ?
•Qu’est ce qui pourrait mettre fin au conflit ?

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Il est fort peu probable que vous ayez entendu parler de ce conflit qui perdure : la révolte des papous en Nouvelle-Guinée

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La Nouvelle-Guinée. La Nouvelle-Guinée est une grande île (la troisième plus grande au monde) au nord de l’Australie et à l’est de l’Indonésie. Pendant longtemps l’île a été l’un des lieux les plus mystérieux du globe, avec une forêt équatoriale dense difficilement pénétrable et des sommets montagneux qui culminent à plus de 4 000 m d’altitude.  Si les européens (portugais) la connaissent depuis 1511 (l’île est proche des fameuses « Moluques », sur la route des épices), elle passera sous domination anglaise, puis néerlandaise, allemande, australienne et finalement indonésienne. Les ethnies originelles qui la peuplent, elles, sont implantées dans l’île depuis plus de 20 000 ans, les papous. Il ne faut pas confondre :

  • la Nouvelle-Guinée qui est l’île dans son ensemble ;
  • la Papouasie-Nouvelle-Guinée qui correspond à la partie est indépendante depuis 1975 ;
  • la Papouasie Occidentale ou simplement Papouasie qui correspond à la partie ouest sous domination indonésienne. C’est cette partie qui crée le conflit actuel.

La colonisation qui pendant des siècles s’est contentée de rester sur les côtes a peu à peu pénétré le pays au cours d’expéditions parfois hasardeuses au XIXe et XXe siècles. La Nouvelle-Guinée et notamment la région de l’Irian Jaya au centre ouest de l’île est resté très longtemps l’une des zones les plus méconnues au monde. En 2010 par exemple, une nouvelle tribu nomade de 2 000 individus dont la langue et les mœurs sont totalement inconnus a été découverte. En 2010 !!!

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Le conflit. Au moment de la colonisation les Pays-Bas s’installent plutôt dans la partie ouest de l’île, à l’est c’est plutôt les anglais, les allemands, puis, plus tard les australiens. Cette séparation va perdurer après la décolonisation, coupant l’île en 2. Notez au passage qu’ici encore, les conflits actuels sont liés aux partages réalisés par la colonisation occidentale. Partout ou presque dans le monde, on retrouve le même schéma : depuis les grandes expéditions maritimes du XVe et XVIe siècles et la constitution des grands empires coloniaux du XVIIIe et XXe siècles, les frontières sont basées sur ces partages. De fait, après les indépendances de l’après Deuxième Guerre Mondiale ou des années 1960, les conflits se cristalisent sur ces frontières qui n’ont pas grand-chose à avoir avec les réalités géographiques, ethniques et historiques des populations locales.

En 1975, la partie est, obtient son indépendance et devient la Papouasie-Nouvelle-Guinée, monarchie constitutionnelle (membre du Commonwealth). C’est un pays qui se développe plutôt bien, avec 8 millions d’habitants. En 1963, l’Indonésie prend possession de la partie ouest de l’île et considère qu’il s’agit désormais d’une « province » indonésienne comme les autres îles. Il faut dire que cette partie de l’île contient les troisièmes réserves les plus importantes au monde de cuivre et les deuxièmes d’or !!!

Hélas, les populations papous qui peuplent cette partie de l’île sont totalement déconsidérés par les indonésiens et un mouvement indépendantiste se développe chez les ethnies indigènes. Notamment, depuis 2009, le mouvement séparatiste « Organisation pour une Papouasie Libre » qui prône le combat armé contre l’Indonésie. On estime entre 150 000 et 400 000 morts le bilan de ce conflit depuis 1963, entre les attaques directes des deux parties, les attentats et les manifestations très durement réprimées par les indonésiens. Depuis 2019, le conflit s’est intensifié. Une partie du financement de ce mouvement semblerait provenir des Philippines qui cherchent à asseoir leur concurrence vis-à-vis de l’Indonésie dans cette partie du monde.

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Voici la carte du monde des conflits dans les années 1990. Regardez les symboles de petits carrés bleus, ils représentent les mouvements indépendantistes plus ou moins violents... Pas si loin de nous et il n’y a pas si longtemps, la paix n’a été signée qu’en 2011, les attentats indépendantistes basques ont fait plus de 1300 morts depuis 1960 en France et surtout en Espagne…

 

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Partons à présent pour l’Afrique. Au Mozambique, la guerre continue…

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Le Mozambique. Le Mozambique est situé en Afrique de l’est, face à Madagascar, bordé par l’Océan Indien, avec au nord la Tanzanie et l’Afrique du Sud au sud. C’est une ancienne colonie portugaise, et d’ailleurs, on y parle encore portugais (comme en Angola et au Cap-Vert). C’était une escale majeure sur la route maritime des épices entre l’Europe et l’Inde (décidément, on en revient toujours à ces grandes explorations maritimes !!!) dès le XVIe siècle. C’est un des pays les plus pauvres du monde malgré une grosse production de coton, de sucre et des gisements importants d’or, de bauxite. En 2010, de très grands gisements de gaz sont découverts le long des rives nord du pays, peut-être le 4ème gisement mondial !

En 1975, le pays devient indépendant (du Portugal), sous régime de type communiste au terme de 10 ans de guerre. Mais dès 1976, une nouvelle guerre, cette fois civile, débute entre un nord soutenu par l’Union soviétique et un sud soutenu par les États-Unis. Ici encore, les 2 blocs capitaliste et communistes s’affrontent indirectement comme il le feront en Afrique et en Amérique Latine pendant toute la Guerre Froide. En 1994, la paix s’instaure enfin au Mozambique après plus d’un million de morts. Mais le pays est un des plus pauvres au monde et sa croissance se fait très lentement. Comme beaucoup de pays africain : le Mozambique est un pays riche terriblement pauvre ! Il faut dire aussi que c’est un pays qui subit fréquemment de terribles catastrophes naturelles (cyclone, sécheresse…).

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Le Cabo Delgado. Le Cabo Delgado est la province nord du Mozambique située à la frontière avec la Tanzanie. C’est la province directement en face des gisements de gaz en cours d’exploration. Mais c’est aussi la province où s’est implanté et développé depuis 2017 la secte fondamentaliste islamique Ansar Al-Sunnah, groupe prônant terroriste désormais la lutte armée et affilié à l’État islamique. Depuis 2017, le groupe a perpétré plus de 350 attentats, plus de 2 500 civils ont été tués et plus de 500 000 personnes ont fui vers le sud.

On croyait l’État Islamique et le terrorisme djihadiste éteint depuis la fin des combats en Irak, Syrie, mais c’est sans compter sur les ramifications internationales des groupes fondamentalistes qui combattent un peu partout notamment en Afrique. Au Cabo Delgado, dans cette guerre, puisqu’il s’agit bien d’une guerre, dont personne ne parle, on trouve pêle-mêle, des grands groupes pétroliers qui cherchent à protéger leurs programmes d’exploitation, notamment Total, des mercenaires russes plus ou moins envoyés par le grand frère depuis Moscou pour aider le gouvernement du Mozambique, mais aussi, pour mettre un pied stratégique dans la région, des groupes djihadistes ultra-violents et surtout une population locale qui continue à vivre dans la misère sous le joug de la guerre civile. La proximité avec la Tanzanie permet d’organiser des replis derrière la frontière, et, bloquer les exploitations pétrolières, c’est s’attaquer aux grand capital international…

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Voici la carte des groupes islamistes militants connus en Afrique en 2017 (publié par le Centre d’Études Stratégiques de l’Afrique). Il s’agit bien d’un grand nombre de groupuscules, plus ou moins organisés, plus ou moins affiliés à des grandes organisations comme AQMI ou État Islamique, parfois non violentes mais le plus souvent usant des techniques terroristes d’attentat, de rapt, de raids, de pillage. Désormais, il semble bien que le terrorisme islamiste se soit déplacé du Moyen-Orient vers le cœur de l’Afrique.

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Allez, je vais finir ce cours par un conflit qui me touche particulièrement. J’ai eu la chance de faire 3 missions (2001-2003-2005) dans ce petit pays d’Afrique Centrale ou sévit une guerre dont plus personne ne veut entendre parler : le Burundi, trop vite effacée par le génocide du Rwanda, trop loin de chez nous, trop abstrait. D’ailleurs, je vous recommande très vivement la lecture de l’ouvrage de Gaël Faye, « Petit pays », prix Goncourt des lycéens 2016.

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De bien petits pays ! Coincés aux milieux des grands frères africains : la République Démocratique du Congo à l’Ouest, l’Ouganda au nord et la Tanzanie à l’Est, voici les petits Rwanda et Burundi, pays des Grands-Lacs, des gorilles, des volcans. Là, se sont croisés les plus grands explorateurs, là est née la légende de Tarzan…et là s’est déroulé un des plus grands et des plus abominables génocides que le monde ait connu !

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Le génocide rwandais. Au XIXe siècle le Rwanda est une colonie allemande, mais, à la fin de la première guerre mondiale, ce sont les belges qui récupèrent le pays, s’appuyant sur la minorité  ethnique Tutsi, classe dominante traditionnelle de la région, mais très minoritaire (85% de la population du Rwanda mais aussi du Burundi est Hutu). En 1959, les hutus refusent l’hégémonie tutsi sur le pouvoir et une guerre civile commence, les tutsi sont pourchassés et massacrés. 200 000 fuient en Ouganda.  En 1962, avec l’indépendance le pays se dote d’une république hutu. Les tutsis tentent par la force de revenir au pouvoir pour rétablir la monarchie. Les massacres et exils continuent.

Parallèlement, au Burundi, ce sont les hutus qui sont massacrés par les tutsis exilés. A la fin des années 1980, 600 000 rwandais (tutsis mais aussi opposants hutus) vivent en exil. En 1990, le Front Patriotique Rwandais attaque le nord du pays depuis l’Ouganda. La France et la Belgique (forces zaïroises)  envoient des troupes pour soutenir le pouvoir hutu en place. Des tentatives de paix et d’instauration démocratique en réintégrant les opposants tutsi se succèdent pendant près de 3 ans, massacres sporadiques, changements de gouvernements, jusqu’en 1993 où les troupes françaises se retirent.

En avril 1994, l’avion du président Habyarimana, d’origine hutu, est abattu, un gouvernement intérimaire qui prône le massacre des tutsis est mis en place, entre avril et juillet 1994, 800 000 et plus probablement 1 million de rwandais seront massacrés ! Et puis le conflit se déplace vers la République Démocratique du Congo à l’est, et vers le Burundi au sud. Depuis 2003, le Rwanda reprend doucement sa place dans les pays en voie de développement en Afrique, c’est même un des pays avec le plus fort taux de croissance (plus de 8% par an) et l’un des phares du développement africain, notamment en matière de services, de nouvelles technologies… mais qu’en est-il de son voisin burundais ?

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La guerre sans fin. Les affrontements qui eurent lieu au Rwanda entrainèrent presque les mêmes conflits au Burundi, et cette fois ce furent les tutsis qui massacrèrent les hutus. 200 000 en 1972, bien que, comme au Rwanda, les tutsis ne constituent que 15% de la population du pays.  Puis, en 1993, ce sont les tutsis qui sont massacrés, puis les coups d’État se succèdent, l’armée étant majoritairement tutsie. En 2000, un accord est signé pour tenter de mettre fin à la guerre civile et empêcher le chef de l’État de rester plus de 10 ans au pouvoir. En 2005, Pierre Nkurunziza, ancien chef rebelle hutu est élu président et s’accaparera le pouvoir de manière autoritaire jusqu’à sa mort en 2020. Alors que le Rwanda semble vouloir se stabiliser, le Burundi continue à vivre dans l’incertitude d’attaques sporadiques, d’attentats, d’affrontements entre armée et rebelles, quasiment d’une colline à une autre,  d’une guerre civile qui ne veut pas dire son nom, empêchant aujourd’hui encore ce petit pays de reprendre souffle et de vivre en paix.

Penser qu’il s’agit d’un simple conflit direct entre 2 ethnies est simplifier un conflit beaucoup plus complexe. Cette opposition Tutsi/Hutu est née dès l’instauration de la colonisation, les allemands et belges privilégiant une ethnie (Tutsi) plutôt qu’une autre et créant des rivalités au sein des populations. À cela s’ajoute un apprentissage difficile de la démocratie, des rivalités locales, des influences internationales, des ambitions dictatoriales de quelques-uns, des enjeux de territoires qui se jouent parfois, comme j’ai pu, moi-même le constater, d’une colline à l’autre.

Je vous invite à écouter ce morceau de Gaël Faye :

Écoutez aussi 2 chansons de Stromae, « papaoutai » et « bâtard » et vous comprendrez un peu mieux de quoi il parle, lui, né en Belgique, et dont le père Tutsi a été assassiné en 1994 au Rwanda…

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Voici la carte des empires coloniaux au moment du partage de l’Afrique entre puissances européennes en 1884. Rajoutez-y les nouveaux partages réalisés après la défaite allemande de 1918 et de 1945 et, sur les frontières, vous pourrez y calquer les guerres et conflits actuels. L’Occident a déchiré les frontières originelles et historiques de l’Afrique pour imposer ses propres limites coloniales, en dépit de toute prise en compte des conditions antérieures et des sociétés initiales du continent. Les africains payent toujours aujourd’hui ces frontières artificielles et inadaptées.

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Conclusion. Vous l’avez vu, à chaque fois, je suis parti d’un conflit sur telle ou telle région, tel ou tel pays, pour élargir au continent, au monde. Les causes des conflits sont le plus souvent à remettre dans le contexte de l’histoire et d’une géographie beaucoup plus vaste, à l’échelle mondiale. Ce n’est pas parce qu’on n’en parle pas que ça n’existe pas.

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Pourquoi n’en parle-t-on pas ou plus ? Donc, plus d’une cinquantaine de conflits armés actuels dans le monde dont certains sont extrêmement violents, et pourtant, rares sont les médias qui en parlent. Pourquoi ?

D’abord parce que les journalistes étaient pratiquement la seule source d’information potentielle sur ce qu’il se passe dans le monde. Un pays qui ferme ses portes au journalisme peut faire « oublier » ses conflits internes aux yeux du monde. Si on ne sait pas, on n’en parle pas. Des pays comme la Russie, la Chine pratiquent allègrement ce type de politique : pas de couverture médiatique, pas de conflit. C’est un jeu du chat et de la souris et bien peu nombreux sont désormais les journalistes qu’on appelle « correspondants de guerre ». Il semble que ce soient les réseaux sociaux qui désormais fassent le relais de ces conflits, auquel cas, les gouvernants tentent de bloquer l’Internet, c’est le cas en Birmanie et à Hong-Kong par exemple. Autre phénomène lié au journalisme, hélas : le spectaculaire. Il est beaucoup plus cinématographique de montrer des chars, des hélicoptères, de grandes explosions, que des escarmouches avec 2 coups de fusil ! C’est triste, mais une bonne guerre doit être vendable… mais pas trop. Je me souviens de la guerre du Biafra (au Nigéria) et des famines qui l’ont accompagné dans les années 1970, les images insoutenables passaient en boucle sur les journaux télévisés, au point d’entrainer la lassitude et le rejet.

Ensuite parce qu’il existe un intérêt qui se distant avec l’espace ou le temps : plus une guerre nous paraitra lointaine et donc, potentiellement nous concernant peu, moins nous en aurons d’intérêt. La guerre en ex-Yougoslavie qui aurait pu s’étendre à l’Europe a été très largement couverte. De même, on oublie les guerres qui ne sont plus « à la mode » parce que trop longue, trop complexes, trop difficiles à comprendre.

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Comment rester au courant ? Bien sûr qu’il est impossible d’être au courant de tout, tout le temps ! Mais en tant qu’universitaire et surtout engagé dans la filière géographique, vous devez vous intéresser au monde, multiplier vos sources, regarder derrière les informations qu’on vous livre, chercher à comprendre pourquoi tel phénomène est arrivé à tel endroit, pourquoi les journalistes ou les gouvernants ne nous en parlent pas, ne nous en parlent plus.  Vous devez avoir toujours à l’esprit ces deux questions intimement liées : où et pourquoi là.

 

 

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