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AKADEM

Akadem  AKADEM 2052

 

Vers le milieu du vingt et unième siècle les progrès informatique avaient atteint un paroxysme technologique qu’il semblait désormais difficile de dépasser. La miniaturisation des microprocesseurs, l’utilisation généralisée des matériaux composites à très faible résistance permettait désormais des vitesses de calcul et des taux de transfert de l’information proches de la lumière. Seuls les réseaux neuronaux humains étaient encore capable d’aller plus vite, plus loin. La mécanique était arrivée au bout de ces capacités, seul le biologique pouvait faire mieux.

Les réseaux de transport de l’information nés de l’Internet et du web à la fin du second millénaire offraient la possibilité de transmettre de n’importe quel point de la planète des informations en quelques nanosecondes. Mais, même quelques nanosecondes c’était encore trop lent !

Parallèlement, les progrès de la biotechnologie, fulgurants à partir des années 2020 recomposaient peu à peu l’homme, de plus en plus artificialisé : puce électronique interne de contrôle des fonctions vitales, yeux artificiels, systèmes de communications directement branchés sur l’oreille interne, régulateurs de température intégré dans la moelle épinière…chaque jour une avancée technique s’adaptait au biologique et les médecins devinrent électroniciens. Chaque mois, on allait voir son tecmed pour une révision des « matériels embarqués ».

Malheureusement, les ordinateurs les plus puissants du monde n’étaient toujours pas capable, en pensée et en action, de dépasser le stade d’un enfant de quatre ans. L’homme restait le meilleur ordinateur.

Un siècle plus tôt, au sein de l’empire appelé URSS une expérience de mise en commun des savoirs avait échoué. Les dirigeants avaient décidé dans la petite ville d’Akademgorodok à quelques kilomètres de Novossibirsk de réunir les plus grands cerveaux scientifiques du pays, en milieu quasi fermé afin de créer une émulation devant accélérer les découvertes. La petite ville des académiciens n’a jamais produit la moindre découverte majeure et fut oubliée au creux de l’hiver de l’Altaï.

L’URSS tomba, la mondialisation généra de nouveaux réseaux, de nouvelles collaborations, l’idée ne fut plus reprise jusqu’en 2052.

L’académie mondiale des sciences, en accord avec les principaux gouvernements des trois puissances du vingt et unième siècle, les Etats-Unis d’Amérique ; les Etats-Unis d’Asie et le Paneurope, décidèrent de retenter l’expérience, mais cette fois, non plus en regroupant les individus mais bien en interconnectant directement leur cerveaux aux quatre coins de la terre. Le projet fut baptisé Akadem 2052.

Dix mille scientifiques parmi les meilleurs de la planète furent sélectionnés selon des critères stricts : très haute spécialisation dans un domaine, très grande rapidité d’esprit, bonne forme physique et psychique. L’objectif était de regrouper bio-électroniquement  les 10 000 cerveaux pour n’en former plus qu’un permettant d’atteindre l’intelligence absolue, le savoir total au sein d’une même interface de dialogue.

Sur les trois continents les éminents professeurs furent transférés dans trois centres construits rigoureusement à l’identique et préparés à la connexion. Ce sont les Etats-Unis d’Asie qui fournirent la majorité des « cerveaux » avec plus de 6500 savants regroupés à Shanghai, 2500 américains à Dallas et 1000 européens à Bruxelles.

Naturellement, l’interface principale fut aussi transférée à Shanghai, avec un miroir dans les principales capitales des pays participants.

Le système de mise en oeuvre était en fait assez simple : chaque participant avait le crâne rasé, puis était installé, nu, dans un caisson d’isolation sensorielle. Quelques milliers d’électrodes dont le diamètre n’excédait pas un centième de cheveu étaient reliés depuis le cerveau à un hub qui recevait les impulsions cérébrales des différents individus.

Les cobayes qui auraient à passer quelques semaines en caisson étaient nourris par sondes et plus ou moins drogués à forte dose. Seuls leurs cerveaux étaient d’un quelconque intérêt pour l’expérience et il n’était pas question de décapiter les 10 000 plus grands chercheurs mondiaux !

Lors des premiers essais, sur une dizaine cobayes, on s’aperçu que certaines électrodes avaient été mal placées : ce qui apparu sur les écrans de contrôle n’était pas l’intelligence ou la mémoire scientifique, mais les sensations et une partie de la mémoire affective des cerveaux. L’interconnexion engendrait également la possibilité pour les individus de réagir aux stimuli et aux sentiments des autres ce qui provoqua quatre dépressions nerveuses et l’arrêt pur et simple du fonctionnement cérébral d’un chercheur européen.

Après cette triste expérience, les neurologues décidèrent de repositionner très précisément  les contacts neuronaux avec les zones du cerveau potentiellement utilisables : la mémoire scientifique, la réflexion, l’esprit de déduction, les facultés de calcul… Une carte de connexion très précise fut diffusée à l’ensemble des équipes et les modalités de regroupement sur le central révisée : les données pouvaient « sortir », mais pas retourner aux cerveaux.

Ce furent plusieurs dizaines de milliards de connexions qui, reliées aux régulateurs locaux puis recentralisées sur l’interface central via les réseaux produisirent au final le plus grand ordinateur que le monde avait produit. La première vraie machine humaine était née, elle bénéficiait en une seule connexion de toute l’intelligence du monde, de tout le savoir, de toute la vitesse de la pensée.

Le président de l’académie mondiale des sciences ainsi que le président des Nations Unies furent tout désignés pour la connexion primale. Une batterie d’ingénieurs, de neurologues, d’informaticiens et de diplomates à l’origine du projet Akadem 2052 se tenaient anxieusement derrière le cordon des officiels. Les deux présidents, face au pupitre de dialogue appuyèrent en même temps sur le bouton « ON ».

En une nanoseconde les 10 000 cerveaux se connectèrent. L’écran de contrôle s’alluma et après quelques secondes interminables, un phrase apparu dans les 143 langues officielles du programme :

OH, MON DIEU !

 

Août 2053 : la chasse au phoque a été bonne cette année, nous aurons des bougies pour cet hiver.

 

Franck VIDAL - 1999

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